Friday, March 20, 2009

Une épiphanie folk en deux actes



C'était un soir de décembre, l'an dernier. L'ennui semblait prêt à s'abattre, je sentais venir la soirée à faire le tour des blogs et des webzines à la recherche de la nouvelle non-star, encore un groupe inconnu sur lequel s'extasier dans son coin en espérant vainement une tournée qui amènerait quatre bouseux du fin fond du Nebraska ou de Nouvelle-Zélande à jouer dans une salle quelconque à Paris devant vingt personnes qui s'en foutent. Si un blogueur essaye de vous faire croire qu'il ne vit que des moments exaltants, n'en croyez rien, c'est un mythe.


Il me restait un vague espoir : trouver un concert le soir même. Il y avait plusieurs possibilités, chacune un peu aventureuse. Se décider en quelques minutes sur myspace. Norman Palm semblait être le meilleur choix. Ma veste, mes clopes, direction le Pop In.


Le début du concert est un désastre. Nous sommes quatre spectateurs et l'individu sur scène est horriblement mauvais. Le fait qu'il vienne de descendre une bouteille de vin en compagnie d'une fille qui s'avère éméchée au point de lâcher son cocktail sur mon seul jean propre n'y est sans doute pas étranger, mais il n'y a rien à sauver. Ni les chansons, ni le charisme inexistant, ni la veste à carreaux pourrie. Sans parler du jeu de guitare, très approximatif, et de quelques notions d'accordage basique que n'importe qui dans la salle aurait pu (ou du) lui rappeler. Le cauchemar du concert au pif, la mauvaise pioche. Le naufrage.


Le seul point positif, c'est que ce n'était pas Norman Palm. Seulement la première partie. Ouf. Si vous avez l'occasion de voir un certain Gustaf Heden, deux solutions s'offrent à vous : évitez, ou jetez-lui des pierres. Les choses ne pouvaient qu'aller mieux ensuite, d'autant que je venais de retrouver un pote, habitué de l'estaminet.


Norman Palm. Un charme évident, désinvolte et sans prétention, qui joue son propre concert avec autant d'autodérision que d'envie d'être là, simplement. Les cheveux un peu trop longs pour être directeur des ressources humaines, les lunettes sur le nez, et l'air incroyablement gentil. Il y a des gens comme ça, on n'a pas besoin d'attendre la première note pour se dire que le concert va être cool, quoi qu'il arrive. Parce que même si il foire son truc, on ne pourra pas lui en vouloir. Désarmant. Et là où ça devient encore meilleur, c'est quand le type est effectivement aussi bon qu'il en a l'air. Aussi bon qu'on a envie qu'il soit. Lui à la guitare, son pote au clavier / xylophone / toy piano / glockenspiel / mélodica, et le comparse qui envoie les projections via un projecteur posé sur deux casiers à bières. La cave du Pop In qui paraissait si minable une demi heure plus tôt redevient ce petit cocon délicieux. Les conversations du bar qu'on entend au loin et qui faisait chier pendant la première partie semblent presque faire partie du concept : un type un peu perdu qui joue ses chansons pour les gens comme lui, ceux qui ont envie de l'écouter, tandis que le brouhaha du monde suit son cours indifférent. Et toujours cette élégance involontaire, cette façon de chanter la partie de trompette sur sa reprise de Boys Don't Cry, de s'arrêter un instant juste avant le refrain parce qu'une fille le prend en photo et de dire l'air complètement dégagé et heureux à la fois, "oh, that's very nice..."


Ca semblait presque incongru d'aller lui demander à la fin du concert s'il avait des disques à vendre. Il n'en avait même pas parlé, et d'ailleurs il ne savait pas trop où il les avait rangés. Et là, le CD... Incroyable. Un truc relié comme un bouquin, une centaine de pages d'illustrations, de textes mis en page, dessins, photos, polaroïds... Les ventes de CDs se cassent la gueule, mais là ça vaut le coup. Pour l'objet magnifique (vous en aurez un aperçu sur son site). Et, en plus, il y a un album à l'intérieur. Les chansons sont excellentes, les arrangements discrets et bien sentis. Imaginez un Tom McRae plus joyeux, plus rêveur. Un Tom McRae qui passerait des disques dans un bar après son concert en enchaînant du Ace of Base et Pulp tout en sirotant sa pinte.


Vous pouvez donc écouter ça, pour commencer :


Norman Palm - Floating Around


Norman Palm - Middletown Blues


Norman Palm - Boys Don't Cry


Mais le mieux serait de vous décider, il joue

- le 19 mars à Roubaix

- le 20 mars à Paris (Le Motel)

- le 21 mars à Rennes (avec Frida Hyvönen)