Sunday, December 14, 2008

Piqûre de rappel


Photo: The Fox Website

Je vais faire un truc dingue, un truc de ouf, violer une règle de base du blogger: je vais reparler d’un groupe sur lequel j’ai écrit il y a seulement 4 posts. Mais l’heure est grave. Au moment où tout le monde prépare son Top Album 2008 (qui avouons-le n’est pas tellement excitant cette année à l’exception de l’exceptionnel Microcastle), je peux déjà vous annoncer que l’album de Fanfarlo, prévu pour mars 2009, sera dans tous vos tops.

Jusqu'à jeudi soir, Fanfarlo c’était 5 mp3s écoutés en boucle depuis 2 mois et quelques messages coolos à propos de Beat Happening et de renards échangés sur Myspace. Mais jeudi soir, Fanfarlo s’est transformé en des gens, en un groupe, en un concert exceptionnel. Il avait fallu convaincre les copains de venir, la salle était vide quand on est arrivé, le scepticisme à son comble. Et puis ça s’est rempli petit à petit, jusqu'à devenir plein de chez plein. Entre deux sosies de Valérie Lemercier et de Stuart Murdoch, on s’est installé et on a tout de suite senti que l’ambiance était différente ce soir. Il allait se passer quelque chose. Fanfarlo donnait son premier concert à Londres depuis quelques mois, de retour des Etats-Unis où ils viennent d’enregistrer un album (celui de ton top 2009). Et dès le premier morceau, on a compris que ces quelques semaines en studio les avaient transformés. On était face à un groupe qui a bossé dur et qui balance des morceaux parfaits, qu’on aime tout de suite même si c’est la toute première fois qu’on les entend. Il y avait une vrai fraicheur et en même temps, on sentait que le groupe prenait son envol, qu’il passait à une étape supérieure et on était tous là pour partager ce moment d’exception parce que ces gars-la ont gardé une générosité presque enfantine qui fait du bien. Ils ont pris un plaisir évident à jouer et le plaisir était partagé par toute la salle. On est tous sorti de là avec un immense sourire et des envies de tomber amoureux.

Fanfarlo est LE groupe de 2009. Souvenez-vous bien que je vous l’avais dit.

Fanfaro – Sand and Ice

Jan 10 - The Buffalo Bar, London, UK
Feb 14 - The Lexington, London, UK
Mar 18 - SXSW, Austin, Texas, USA

Tuesday, December 02, 2008

L'album de l'immaturité



[Nous retranscrivons ici une causerie du Professeur Avec Desvaches, de l'Observatoire des Carrières Musicales]

Gambergeons un instant vous et moi sur les étapes qui ponctuent la vie d'un groupe. Certaines semblent inévitables, les piles de dossiers similaires qui s'accumulent sur nos bureaux en attestent. Nos archives atteignent une telle masse que leur attraction newtonienne suffit à dévier des planètes de leur course. Alors les petits jeunots qui fondent un groupe en s'imaginant qu'ils vont suivre une autre trajectoire, fouler des territoires inconnus, je vous en parle même pas. Pour la plupart, ils finissent par répéter malgré eux les errements de leurs prédécesseurs et périr aspirés dans le vaste trou noir et gluant, très sale, que constitue l'histoire du rock.

Résumons grossièrement.

La première étape est connue : on dégote une guitare pourrie pour faire le malin devant les filles, on apprend éventuellement trois accords (option facultative), on croise un autre type qui a fait le même raisonnement, on trouve un bassiste qui a fait le raisonnement qu'il était trop timide pour jouer de la guitare devant les filles alors il a choisi la basse pour être recruté par les deux autres qui attirent les filles et ainsi profiter du surplus, puis on trouve un batteur qui n'a pas fait de raisonnement (c'est un batteur).

Ca peut s'arrêter là, un concert le 21 juin pendant quelques années jusqu'au premier boulot qui paye, un appartement décent, une compagne stable et un chien nommé Skiff. On arrête la musique et on attend paisiblement la calvitie dans un bureau. Mais parfois ça continue, le groupe arrive à jouer, à trouver des concerts, enregistre un album. C'est la carrière. Les étapes de la carrière sont répertoriées aussi : galère, engueulades, drogue, mort. Les plus endurants persistent jusqu'à l'album de la maturité. L'album de la maturité consiste en une collection de chansons très propres et bien enregistrées que la critique adore pendant environ une semaine avant de le poser sur une étagère où il est condamné à prendre la poussière jusqu'à la fin des siècles, parce que l'album de la maturité est chiant comme c'est pas permis.

Après, il y a le fastidieux album du retour aux sources, qui essaye de reprendre les choses telles qu'elles étaient avant l'album chiant. La critique le trouve très bien comparé au précédent, qui était chiant (disent-ils, après coup) mais ça reste quand même assez fade. A ce stade, la carrière du groupe est aussi excitante qu'un caniche à calvitie, plus grand chose à en attendre à part la sortie d'un best-of et des concerts à 40 euros la place. Et pourtant, il y a toujours des gens pour aller les voir parce qu'il s'agit alors d'un grand groupe, le single passe sur RTL2, ça vaut le coup d'aller voir un concert par an grâce au comité d'entreprise tandis qu'à la maison que le chien se tape la baby-sitter.

Quelle misère.

Aussi, nous ne saurions trop vous conseiller de profiter des groupes tant qu'il est encore temps. Tant qu'ils sont encore joyeusement crétins et débridés, tant que leur seul plan de carrière consiste à foncer droit dans le mur pour essayer de l'abattre à coups de tête. The Deathset, c'est à peu près ça : ça va très vite, 18 titres en 25 minutes, ça s'égosille façon Beastie Boys, ça brasse un paquet d'influences un peu comme The Go! Team avec beaucoup plus de punk et des claviers ultra cheap, l'équivalent à guitares de ce cinglé de Dan Deacon (tournées communes et remixes, l'univers est étrangement cohérent) et un budget d'enregistrement probablement inférieur au prix moyen d'un kébab. Preuve ultime que The Deathset n'est pas près de sortir un album de la maturité ? Ils ont deux batteurs.

The Deathset - Listen To This Collision

The Deathset - Moving Forward

The Deathset - Peak oil


Certes, on peut trouver que l'album manque un chouïa de punch, mais écoutez le live disponible ici, perdez une heure de plus sur youtube et vous vous mangerez les orteils si vous n'êtes pas aux Transmusicales ou si vous les avez ratés en mars.