Friday, March 28, 2008

Petit ours brun


Dessin : Frànçois

L’année dernière, j’ai vu Grizzly Man et je suis devenue un peu obsédée par le truc. Il s’agit d’un documentaire sur Timothy Treadwell, ce garçon qui partait vivre avec les grizzlys en Alaska tous les étés pour les défendre. J’ai d’abord trouvé génial qu’il ait des copains renards. Oui, tous les étés, il retrouvait aussi ses copains renards qui le suivaient partout dans la montagne en lui faisant des petites blagues. Sérieusement cool.
Mais évidemment, ça s’est mal terminé. Pas dans le style comico-streape-tease du Project Grizzly. Non, Timothy a fini tué par un des ours. Et même si au long du documentaire, on se rend compte qu’il est un peu fou, ce mec reste profondément touchant parce que ces ours, c’est son refuge. Grizzly Man voulait juste échapper à cette société du travailler-plus-pour-gagner-plus dans laquelle il était mal à l’aise. Et au fond, on a tous un "refuge ours" à notre façon. Pour les indie kids, les ours se transforment en disque mais c’est un peu la même chose.
Moi, mon ours, c’est Frànçois.

Frànçois, c’est un peu la réponse à l’éternelle question que les français peuvent se poser : mais pourquoi personne en France n’arrive à faire de la pop comme Belle and Sebastian ? Même Carla aurait demandé la recette à Gordon Brown, me confirme notre envoyé spécial à Buckingham. Et ce cher Gordon lui aurait répondu : « mais enfin my dear, vous avez Frànçois ! ».
Depuis son départ à Bristol en tant qu’assistant de français, Frànçois a du trouver la recette magique dans la cave du Cube Cinema ou dans la petite ferme des collines de la ville. Il commence par enregistrer des chansons lo-fi dans sa chambre dans la veine de Dominique A, comme le mini-tube Revu qui donne instantanément envie de tomber amoureux.

Frànçois – Revu

Frànçois – Katrina

Et puis, Frànçois trouve des copains renards pour l’accompagner : les Atlas Mountains. Ça donne l’album The people to forget. Un grand pas en avant vers une pop mélodique, plus travaillée tout en gardant son aspect artisanal. Un disque familial. Un disque fabuleux.

Frànçois & the Atlas Mountains – I’m so glad I met you

Mais comme les ours d’Alaska, le petit ours Frànçois est une espèce en danger. Face aux galères de l’auto-promotion, il a décidé de délaisser un peu la musique fin 2007. Il a alors mis en ligne son troisième album inachevé, Brother. C’est le meilleur album de 2007 et il est disponible gratuitement sur internet !
Il faudrait lancer un WWF sauver l’ours Frànçois. Et pour ça, rien de plus simple : rendez-vous samedi soir au Centre Pompidou pour un concert exceptionnel de Frànçois & the Atlas Mountains. Tender Forever et Vale Poher partageront cette excellente affiche avec notre ours.

Frànçois (featuring Sleeping States) – Night Lights

Frànçois & the Atlas Moutains – Tour de France

Frànçois & the Atlas Mountains – Tracey Emin

Les disques de Frànçois et ses incroyables petits films s’achètent sur son site. Son dernier album se télécharge ici.
Je fais un bisou à celui ou celle qui vient déguisé en ours. A demain.

Tuesday, March 25, 2008

Les aléas du romantisme



Une pluie fine et printanière rafraichissait l'air de la ville. Dehors le monde filait plus doux, plus lointain, notre table était un îlot délicieux au milieu de ce restaurant où même les vendeurs de fleurs ambulants et l'accent italien forcé des serveurs ne nous atteignaient plus. Je contemplais son visage à la lueur des chandelles et nous étions simplement heureux.

Je m'enquis de la cuisson de ses spaghettis bolognaise.

"- Ils sont succulents", me dit-elle, avant de plonger la tête dans son assiette.
"- A ce point ?", l'interrogeai-je d'un air probablement interloqué. Mon étonnement crût encore en constatant que son crâne n'existait plus qu'à moitié et que son cerveau sanguinolent et broyé se mélangeait harmonieusement avec les boulettes de viande, tandis que ses longs cheveux blonds s'imprégnaient de sauce tomate dans un mimétisme parfait avec les spaghettis. Je n'avais jamais vu quelqu'un faire corps avec sa nourriture à ce point. Je réalisais aussi que quelque chose n'allait pas et qu'une détonation venait de retentir dans la salle. Le temps que je mis à relier ces deux éléments s'expliquait certainement par la différence entre la vitesse de la lumière et celle du son qui venait d'assourdir mes oreilles. A la table d'à côté, un individu gominé rangeait sous son veston une arme à feu de gros calibre.

- Mais... mais vous venez de lui flinguer la cervelle ?!
- Cette greluche a osé couper des spaghettis.

Décidément, je suis pas fait pour les plans classe.

Pendant ce temps Jay Reatard enregistrait des albums et des EPs et des singles en-veux-tu-en-voilà en se foutant éperdument du romantisme en batterie et des restaurants italiens, comme il passe sa vie à le faire depuis dix ans avec une foultitude de projets que je n'essaiera pas d'énumérer parce que ça prendrait des plombes et que ce mec va trop vite, Angry Angles, Nervous Patterns, avant ça The Reatards ou The Lost Sounds et j'en passe, allez voir sur Wikipedia si j'y suis, maintenant sa carrière solo et une tournée aux quatre coins des Etats-Unis, un album de garage punk lo-fi frénétique en 2006 chez In The Red évidemment pas distribué ici, Blood Vision, une série de singles qui sortiront chez Matador cette année, cherchez pas à tout comprendre, vlan


Jay Reatard - My Shadow

Jay Reatard - My Family

Jay Reatard - Oh It's Such A Shame


Vous constaterez que l'écoute des ces morceaux peut devenir obsessionnelle, au point qu'en cas d'urgence auditive on est souvent tenté de couper les fils de ses écouteurs pour les démêler au plus vite. La vie est parfois mal faite : les spaghettis fonctionneraient aussi bien en petits tronçons, mais c'est contraire au code d'honneur de la pasta. Couper les fils des écouteurs, on a le droit. C'est juste débile.

Monday, March 10, 2008

Le t-shirt après le split



Il y a des groupes dont j’ai envie de parler ici depuis très longtemps. Depuis les premiers balbutiements de ce blog. Même avant. Depuis que Cécile a lancé l’idée, en gros.

"Ouais, on fait un blog ! Et puis on parlera de ça et de ça et de ça ! Et d’Arrah and the Ferns !"

J’ai traîné, comme d’habitude. Des petits bouts de brouillons ici et là, des idées liées à l’automne et qui ne tenaient plus trois mois plus tard, j’ai remis indéfiniment. Là, je pensais écrire un truc sur une histoire de t-shirt...

Arrah and the Ferns, j’étais tombé dessus sur myspace ou je ne sais plus où, à l’automne 2006. Le genre de révélation qui éclaire une soirée morne, on écoute un morceau, puis deux, puis on passe la moitié de sa nuit à recliquer inlassablement sur les quelques titres disponibles parce qu’on sait qu’on tient un truc et on se demande déjà comment on a fait avant. Dans la foulée, j’avais envoyé un mail ou un comment myspace ou n’importe quel autre truc qu’on peut envoyer à n’importe quelle heure quand on a une meilleure amie qui habite à 500 kilomètres et qu’on a tout de même un dernier scrupule à la réveiller pour lui parler d’un groupe, aussi excellent soit-il, non quand même c'est pas raisonnable.

- J’ai trouvé ton nouveau groupe préféré, ça s’appelle Arrah and the Ferns.
- Tu sais qu’il est cinq heures du matin, là ?

J’ai évité ça, mais de peu.

Arrah and the Ferns - Science Books


Ok, c’était un peu exagéré, mais pas tant que ça. On a parfaitement le droit d’avoir un nouveau groupe préféré chaque semaine, tant qu’on n’est pas le NME, ça passe. Et surtout, connaissant les goûts de Cécile, je savais qu’on serait parfaitement d’accord. Arrah and the Ferns, c’était tout ce qu’on avait en commun, un petit groupe indie folk formé pour une chanson au hasard d’un open mic au fin fond de l’Indiana, une chanteuse à la voix délicieuse comme un bisou sur la joue, un album enregistré à la maison parce qu’ils avaient envie de jouer, juste jouer comme des gamins qui ont trouvé une guitare, un banjo, ce genre de trucs avec lesquels on peut s’amuser à bricoler des chansons et se dire que hé, elles sont pas si mal, ces chansons?

Elles étaient vraiment bien, les chansons. Et ça nous a accompagné. Pas une semaine ou un automne, plus que ça. Je me souviens d’avoir vu l’album en chair et en os (bon, plastique et carton, certes, mais c’est un peu moins romantique. Tu comprends, cher lecteur ô combien tout ça, on est tenté de faire de la littérature. Si peu.) vu l'album chez Cécile à Bordeaux en février de l’an dernier. Je me souviens aussi d’avoir vu les dates de tournée d’Arrah and the Ferns alors qu’elle partait en stage à New York. "Quoi, comment, mais tu vas pas voir Arrah and the Ferns avant moi, quand même ?! " ... Ca m’apprendra à pas bosser.

Arrah and the Ferns - Tokyo Tokyo


Cécile partait à New York en juin. Mon anniversaire tombait quelques jours avant, mais elle pensait trouver quelque chose de cool à New York. N’ayant jamais attaché beaucoup d’importance à la date exacte, ça me convenait parfaitement. J’ai juste cogité tout l’été sur ce qu’elle avait pu trouver...

Novembre 2007. Je revoyais Cécile pour la première fois depuis son périple états-unien et elle avait un cadeau pour moi. Un cadeau, un cadeau, un cadeau ! Mais quoi ?! Et là, au terme de la soirée où j’avais reparlé de ce concert au Cake Shop que je n’avais pas vu (rhaaaaaaaaa, jalousie intense... content pour elle, mais jaloux), elle extirpe de sa valise... un t-shirt Arrah and the Ferns. J’étais à la fois fou de joie et complètement incrédule de n’avoir pas pensé à ça, moi qui passe ma vie à porter des t-shirts de groupes. Notamment des t-shirts jaunes. Cécile y avait pensé.

Arrah and the Ferns ont annoncé il y a quelques jours qu’ils se séparaient. Une bête histoire de batteur qui décide de partir, de van qui se ratatine dans un accident sans gravité, de peu d’espoir pour un groupe basé à Muncie, Indiana. Arrah continuera avec un autre projet à Philadelphie et ça sera sûrement très bien, on lui fait instinctivement confiance. Reste qu’on ne les verra jamais en Europe, ni à Paris ni à Bordeaux. Tant pis. Il reste une belle histoire. Il reste que je porte parfois beaucoup plus qu'un simple t-shirt. Cécile est née un 10 mars et je suis heureux que cette fille existe.

Arrah and the Ferns - Skylark

Monday, March 03, 2008

Horreur, malheur



Puisque nous sommes informatifs (c’est pas moi qui le dis, ça fait toujours plaisir), il me paraît opportun d’alerter la populace – pardon, nos lecteurs ô combien choyés :

...


ALEEEEEERTE !!!

Une malédiction rode actuellement autour de nous, peut-être juste sur vous en ce moment sans que vous vous en doutiez. Allez-y, flippez vos races.

Comment ça a commencé ? Un anniversaire dans un bar, une parka sur la banquette, une poche qui ferme mal, des affaires éparpillées. Puis un autre bar, plusieurs bloody mary. Là, je me rends compte qu'en plus de la carte orange que quelqu'un avait retrouvé par terre tout à l'heure, j'ai paumé un carnet que j'ai toujours en poche. Je retourne dans le premier bar, je retrouve ledit carnet bizarrement coincé sous une porte de toilettes hors service (mais propre) et je retourne à mon bloody mary. J'aurais du tilter. Ce n'est que bien plus tard dans la nuit, alors que j'étais déjà loin, que je me dis "tiens, je vais écouter un truc". Et là, c'est le drame. Plus de lecteur mp3.


J’ai d’abord cru que j’étais un cas isolé, mais non. En racontant cette mésaventure à Sylvain, il me répond que lui, on lui a volé son lecteur mp3 la semaine précédente au Costa Rica. Ouais, c’est tout de suite plus classe (ou plus Bernard Lavilliers, va savoir) mais que voulez-vous, on ne choisit pas. Quant à Camille, elle a détruit ses écouteurs, Dieu sait comment. Une conclusion s’impose : il y a en ce moment une malédiction sur les lecteurs mp3. Je vous laisse cinq minutes pour vérifier que le votre est toujours en état de marche.

Je voudrais donc ici signaler au bâtard qui m’a embarqué mon Archos que si je retrouve son adresse, je viendrai personnellement l’oindre de merde. Ce gougnafier inscrupuleux, outre qu’il récupère quatre gigaoctets d’une culture musicale qu’il ne mérite pas, m’expose à un supplice depuis longtemps oublié : les conversations dans les trains, le métro, les bus de nuit... Les plus grandes imbécillités sur les dossiers à gérer, "je vous rappelle je n'ai pas les documents", la goth moche qui demande à on ne sait qui à l'autre bout du non-fil "tu sais pas où sont passées mes cuissardes, tu sais, celles que je mettais pour aller aux Caves?", les discussions sur les orphelinats de kangourous (là je leur en voulais parce qu’ils n’en ont pas parlé longtemps)...


Plusieurs solutions s’offrent à moi.

- Soit je rachète un lecteur mp3 (si vous voulez vous cotiser, j’aimerais passer aux 30 gigas)

- Soit je m’habitue à utiliser dans les transports le genre de bouchons d’oreilles que je ne mets même pas pour un concert de Motörhead

- Soit je jette les voyageurs par les fenêtres un par un.


A ce stade, le sevrage musical devient tellement douloureux que j’ai envisagé de mendier ne serait-ce qu’une chanson, quelques notes, afin de tenir le coup dans un putain de métro bondé. Mais à qui ? Qui donc aura pitié de ma détresse auditive ? Qui dans ce wagon ? Toi, peut-être ? Avec ton t-shirt du Rocky Horror Picture Show et tes Doc Martens aux pieds, tu dois forcément avoir quelque chose de bien pour mes oreilles en perdition ? ... même James Blunt, à la limite je m’en fous, aide-moi !

... Bon. James Blunt, honnêtement, ce serait pas mon choix prioritaire. Si tu pouvais avoir Two Ton Boa, ce serait cool. T’as pas Two Ton Boa ?! Tu... Ok, je t’explique pour la prochaine fois. Two Ton Boa, c’est le genre de groupe qu’on découvre parce qu’ils ont tourné avec les Dresden Dolls cet hiver aux Etats-Unis, ce qui est déjà bon signe. Two Ton Boa, c’est surtout Sherry Fraser, chanteuse et bassiste passablement dérangée comme on aime. Le son du groupe repose sur sa voix, deux basses, une batterie rêche à la Steve Albini (c’est pas lui mais c’est pareil) et c’est à peu près tout. Un peu de claviers ici et là, mais discrets. Tout ça est assez torturé mais immédiatement accessible, et… bref, écoute : tu mets déjà ça dans ton mp3


Two Ton Boa - Cash Machine

Two Ton Boa - Cyanide

Two Ton Boa - Favorite Bloody Patient

en attendant l’album que tu vas commander chez Kill Rock Star parce que tu es quelqu’un de bien qui soutient les labels indés (il ferait pas ça, l’enfoiré qui s’est barré du Hide Out avec mon lecteur mp3). Et quand on se recroise dans le métro, tu as tout ça sur toi.
On fait comme ça ?


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Post scriptum en date du 10 mars :
- Camille a eu de nouveaux écouteurs pour son anniversaire (pas le même anniversaire que celui évoqué plus haut, allez pas croire, j'ai plusieurs amis). Moins d'une semaine après, elle les perdait au cours d'un concert dans un bar.
- Le mp3 de secours de Sylvain a planté, sa clé USB mp3 d'urgence se décharge toute seule, puis se perd.
- Le minidisc de Barz a rendu l'âme.

Le mec qui déconne avec le vaudou a le droit d'arrêter ses conneries. Merci.