Wednesday, February 28, 2007

Et le César du meilleur espoir féminin est attribué à ...



20h approchait. On était le 3 novembre 2004 et le présentateur de France Inter répétait de nouveau que George W. Bush venait d’être réélu. Comme ça devait être le cas pour beaucoup de gens ce soir-là, des centaines de questions se bousculaient dans ma tête : comment les gens avaient-ils pu re-voter pour ce type ? Qu’est-ce qu’il allait arriver à notre pauvre planète ? Je me souviens de ce fort sentiment d’incompréhension qui m’avait envahi. Je ne voulais pas croire que c’était vraiment en train d’arriver. Et puis, j’ai réalisé que j’avais un ticket pour le concert de Shannon Wright. Je n’avais jamais entendu un seul morceau de Shannon Wright, j’avais juste acheté ma place après tout le bien dont on m’avait dit d’elle. Mais là, je n’avais pas vraiment envie de bouger de chez moi, je voulais rester tranquille pour absorber le choc. Et puis finalement, je me suis décidée et je suis allée au Son Art.

C’est Julie Doiron qui assurait la première partie. Enfin tentait d’assurer… Je me souviens de ce concert comme d’une situation très embarrassante parce des gens parlaient très très fort au bar et c’était quand même très gênant pour nous et surtout pour elle. La pauvre Julie Doiron était visiblement perturbée mais à l’image de ses chansons qui sont de petites choses douces et sans prétention, elle semblait trop timide pour leur dire de la fermer.

Et puis Shannon Wright a débarqué sur scène et on n’a plus du tout entendu les mecs du bar… Shannon Wright n’a pas dit un seul mot de la soirée. Quelqu’un m’a raconté que deux jours plus tôt, en concert à Lyon, elle avait beaucoup parlé de l’élection américaine. Mais ce soir-là, à Bordeaux, pas le moindre mot. Je ne crois pas qu’elle avait besoin de dire quoi que ce soit de toute façon. Ce concert est l’une des plus grosses claques que je me sois jamais prise. Je sais que comme beaucoup de gens, j’ai une terrible tendance à changer mon groupe-préféré-du-monde-entier toutes les semaines, mais ce concert rentre vraiment dans le top 5 des concerts les plus impressionnants que j’ai jamais vu. Elle a semblé se donner comme si c’était le dernier concert de sa vie. Il y avait une telle force et rage dans chaque note qu’elle a joué et dans chaque mot qu’elle a chanté. Je manque de mots pour décrire à quel point elle était incroyable. Elle a terminé le concert étalée sur le sol mais ce n’était pas un truc pour faire rock’n’roll ou quoi que ce soit, c’était quelque chose de vraiment cathartique dont on avait tous besoin. Je me rappelle parfaitement qu’en sortant, je me suis dit « Mais merde à ce putain de George W Bush, il y a toujours de l’espoir, surtout tant qu’on aura des gens comme Shannon Wright ! ». Je crois que c’était la meilleure chose qui pouvait m’arriver et je garderai toujours en mémoire cet espoir que Shannon Wright m’avait donné ce soir-là. Ça peut sonner un peu pompeux mais il s’est vraiment passé quelque chose au Son Art le 3 novembre 2004.

Et cet espoir et cette force je les ai retrouvé dans les disques de Shannon Wright. Après une première impression qui peut sembler pessimiste et plutôt sombre, ils sont là cachés et prêts à surgir. Le nouvel album de Shannon Wright s’appelle Let in the light, et elle laisse enfin cet espoir ressortir de façon évidente. Bien plus apaisées que sur Over the sun, les chansons de Let in the light laissent une grande place au piano pour des morceaux envoûtants où l’espoir est là. Mais ce disque n’est pas seulement important parce qu’il donne de l’espoir mais tout simplement parce qu’il s’agit d’un très grand album où la beauté des mélodies s’impose d’elle-même sur des chansons comme Steadfast and True ou Louise. J’aimerais que toute la population américaine puisse entendre un jour la musique de Shannon Wright qui en dit plus que n’importe quel discours anti-Bush.

Shannon Wright - In The Morning

Shannon Wright - Everybody's Got Their Own Part To Play

Let in the light sort le 26 mars en France sur le label Vicious Circle. Shannon Wright sera ensuite en tournée en France, toutes les dates ici.

Monday, February 26, 2007

A l'arrache



Ecrire un texte sur Jason Webley, au début je me disais que ce serait assez simple. "Un peu de qui - quoi - où - quand, une ou deux anecdotes et basta, tu vas pas trop te fouler"... Mais plus j'y pense, moins ça me paraît vraisemblable, comme histoire.

Jason Webley est à l'accordéon ce qu'Indiana Jones est à l'archéologie. Et pas seulement pour le chapeau. C'est le même genre de double vie: quand il est chez lui à Seattle, Jason Webley enregistre des albums bien écrits, avec des arrangements recherchés, baignés dans la tradition américaine déglinguée dont Tom Waits est le grand représentant. Et puis il part en tournée. Et là ça vire à l'aventure autour du monde comme une course folle.

Jason Webley voyage simplement avec son accordéon, sa guitare, et une bouteille de vodka remplie de pièces de monnaie de tous les pays qui lui sert de maracas. Il est toujours vêtu d'un pantalon de toile hors d'age et coiffé d'un chapeau usé sur ses cheveux en bataille. Ses voyages semblent toujours au bord de l'improvisation, entre les concerts déplacés, reportés - tout dépend de qui veut bien l'accueillir. Il n'est pas rare qu'il envoie des mails pour signaler qu'il a un soir de libre et qu'il peut jouer n'importe où (salle, club, école, prison, appartement...) ou qu'il ne sait pas où dormir deux jours plus tard.

Peu importe, il s'en sort toujours. Même quand il se retrouve dans un club extrêmement louche à Moscou, même quand il se fait voler son laptop dans le métro de Prague, juste avant de dîner avec un des hommes les plus riches du pays. Même quand il donne un concert à Paris avec un accordéon cassé - ce qui est embêtant, pour un accordéoniste - accordéon qu'il fera revisser sur scène le lendemain par un membre du public tout en jouant un morceau à la guitare. On voudrait inventer un personnage de film ou un héros de roman, on ne ferait pas mieux. Jason Webley a le charisme et le sens de l'improvisation qui permettent de se sortir de n'importe quelle situation, et de se mettre n'importe quel public dans la poche, n'importe où dans le monde. Personne ne peut rester insensible à sa manière de jouer avec les réactions de la salle, à son sens de la narration, et surtout à sa voix rocailleuse et ses chansons imparables, que ce soit des rugissements en martelant la scène à grands coups de talons ou des ballades à vous fendre le coeur. On en ressort émerveillé.

Il n'y aurait plus qu'à proposer quelques morceaux aux plus sceptiques d'entre vous, mais nous aussi on fait les choses de manière un peu bancale. Impossible d'uploader les mp3s. Bon. Pendant qu'on va se renseigner pour voir si on peut toucher une pension d'invalidité, vous pouvez visiter la page MySpace de Jason Webley, revenir un peu plus tard quand on aura résolu le problème ou simplement me croire sur parole et aller le voir en concert (je serais vous, je ferais ça) :

- Lundi 26 février au Peanuts (Montpellier)
- Mardi 27 février à l'Inca (Bordeaux)
- Mercredi 28 février au Trabendo (Paris) en première partie de Regina Spektor (sold out)
- Jeudi 1er mars au Studio de l'Ermitage (Paris)

Et si vous chantez assez fort sur The Drinking Song, une inconnue vous paiera sans doute une bière. (Merci Marie)

PS. Aaaaah, enfin les mp3s...

Jason Webley - The Graveyard

Jason Webley - Last Song

Jason Webley - Drinking Song

Saturday, February 24, 2007

Quand elle n'y croyait plus



Tu étais submergée de tristesse ce soir-là, tu croyais avoir une amie et ce n'était qu'un mirage. Tu y croyais déjà mais non toujours pas, perdu. Tu as pensé à moi, moi aussi je pensais à moi mais je suis un égocentrique. Tu as pleuré sur mon épaule à 300 kilomètres, on a parlé longtemps la nuit. "We are your friends" non pas ce soir, elle t'a déjà crié dessus, nous n'irons pas crier encore sur un dancefloor. Du calme et de la douceur. Tu es mon amie et tu sais qu'il te faut surtout la douceur comme une feuille d'automne sur ta joue pour essuyer les larmes. J'ai ce qu'il faut pour toi, je veux prendre ta douleur (ah non c'est pas ça).

Les bisous en mp3, c'est Au Revoir Simone. Trois new-yorkaises electro pop, de la douceur pour les nuits tristes ou le petit courant d'air frais à la fenêtre au matin quand tu n'as pas beaucoup dormi, tu revois le soleil et tu sais que la vie est belle. Que veux-tu que je te dise de plus? Tu sais tout. Au Revoir Simone c'est ton bain de jouvence, le retour adolescent, l'innocence à portée de iPod. On ira les voir ce soir à la Maroquinerie, même si tu n'es pas là, tu seras là quand même.

Au Revoir Simone - Sad Song

Au Revoir Simone - Don't See The Sorrow

Au Revoir Simone - Dark Halls

Viens tôt pour ne pas rater Hafdis Huld et Soko en début de soirée, on en reparlera sans doute ici bientôt. Au Revoir Simone revient au printemps, quelques dates sont déjà annoncées pour la fin du mois d'avril. Gardez les yeux ouverts.

Nous aussi on peut jouer ce blog jeu trop private. Bisous à tous, même aux Plasticines.

Wednesday, February 14, 2007

Awesome Sound



Par où commencer ? Peut-être par dire que mon banquier doit rêver chaque nuit que Total Heaven prenne feu. Total Heaven, c’est le genre de disquaire que l'on oublie pas, comme Edgeworld à Brighton (il faudra écrire un jour sur ce lieu incroyable). Le genre de disquaire auquel on repense quand on tire de notre discothèque ce groupe obscur qu’on a découvert là-bas et qu’on est tellement fier de faire écouter à nos copains : « ça, je l’ai acheté à Total Heaven ». C’est un peu comme le Label rouge garantie qualité.

Total Heaven, c’est le meilleur disquaire de Bordeaux, mais aussi de France tout court. Même Luz l’a dit. Et Luz a toujours raison (je l’ai déjà dit, je sais, mais il y a certaines choses qu’il est bon de rappeler). Quand on arrive, il y a plein de vinyles sur la vitre, ça annonce bien les choses. Et après à l’intérieur c’est l’explosion : partout des couleurs, des fanzines, les rubriques de vos rêves (personnellement, je me jette toujours sur « riot grrls, girl bands ») et les disques que vous auriez imaginé ne trouver nulle part (« quoi mais y’a le Fujiya & Miyagi et ce vieil album de Mirah ?!? Oh merde, combien il me reste sur mon compte ? »). Voilà pourquoi mon banquier n’aime pas Total Heaven. Parfois, je me force même à ne pas y aller, mais j’y retourne toujours parce que je sais qu’il y a ce disque là qui m’attend depuis des semaines au fond d'un bac.

Et puis il y a l’enthousiasme d’un mec comme Martial. C’est surtout lui en fait que mon banquier doit haïr. Je me souviens, il y a 4 ans, quand je suis arrivée à Bordeaux, je n’osais pas lui demander conseil parce que j’étais impressionnée par sa culture musicale. J’étais vraiment bête (il m’arrive encore d’être bête mais seulement de temps en temps hein…) parce que c’est le garçon le plus gentil du monde et qu’il a fait découvrir à moi et un tas d’autres gens des groupes fabuleux. Total Heaven comme son nom l’indique, c’est le paradis absolu. Tout le monde devrait acheter ses disques à Total Heaven. Seriously.

Vendredi et samedi, Total Heaven célèbre ses 10 ans avec deux soirées à l’Hérétic et une affiche fabuleuse. Flyer. Et quelques morceaux des groupes qui vont se produire :

Pull - Bad relations **exclusive track**
Kap Bambino - Neutral
Kim - Black Flag

Et en plus, Primus débarque de Paris pour la soirée de samedi, alors venez danser toute la nuit avec nous en sirotant des vodkas-pomme.

Monday, February 05, 2007

L'année du Lapin



- Vous comprenez, docteur, j'étais très jeune quand j'ai vu Sacré Grall pour la première fois. Vous vous souvenez de la scène avec la Bête de Caerbannog?
- What, behind the rabbit?
- It IS the rabbit!
- You silly sod.

Ce fut ma dernière conversation avec un psy. Peu importe, après tout, mon cerveau va très bien comme ça - j'ai juste une envie délirante de vous parler de lapins. Ce qu'aucun psy n'a compris, c'est que le lapin n'est pas n'importe quel animal, pas un vulgaire machin rongeur. Alors imaginez ma stupeur lorsque j'ai entendu parler d'un groupe qui s'appelait Lapin Machin. Ca sentait l’oxymore à plein nez. Examinons un peu la bête.

Lapin Machin est un animal à trois têtes, ou parfois quatre. Sa présence a d'abord été signalée dans la cave d'un bar du 11e, à l'occasion des open-mics du Pop In. Mais le lapin ne se laissait pas enfermer, il a commencé à ronger d'autres scènes jusqu'au soir où on l'a vu, Cécile et moi. Heureusement qu'on était deux, sinon je penserais que j'avais rêvé ce truc-là. C'était au festival Mo'Fo, le 29 juin dernier. On est restés éblouis. On avait vu un truc auquel on ne s’attendait pas, une sorte de cadeau surprise rien que pour nous.

Vous aussi, vous avez droit à un cadeau. J'aurais juste envie de vous dire qu'il faut les voir absolument – chut, ça reste un secret entre nous, hein? Fais moi confiance, viens. Vous auriez l'effet de surprise, vous sauteriez dans tous les sens et vous en sortiriez heureux et euphoriques pour plusieurs jours. Seulement voilà, on écrit sur un blog, il faut mettre des mots là-dessus. C'est con, hein? Oui mais bon, on s'y colle.

Lapin Machin, c’est un trio qu'on peut classer vite fait dans l'antifolk, si on n'a que ça à faire. Ce serait dommage. Vous risqueriez de vous dire "Moldy Peaches et compagnie, ok, je connais ça". Ben oui, mais Lapin Machin c'est autre chose. C'est juste un des groupes les plus joyeux et débridés qu'on puisse voir sur une scène en ce moment. Du DIY intégral, une batterie en carton, des guitares et une basse un peu cheap, un mégaphone et d'autres trucs ici et là. Un joyeux bordel, à vrai dire. Et ça suffit pour faire un groupe: des morceaux qui tiennent la route joués par des trois gamins cinglés. C'est ce que j'appelle un groupe punk: un groupe qui se fout de "ce qu'il faudrait faire". Des punks joyeux qui mettent leur vie en musique. J’ai pris l’habitude de les voir jouer et je n’ai pas d’autres mots que ça: je les aime. Violette Lapin a l'air de vivre sur un autre rythme, un peu plus rapide que tout le monde. Joe Lapin a l’air de se foutre d'avoir une voix un peu bizarre (après tout, est-ce que Frank Black chante "comme il faut"?). Mika a juste l'air un peu out of this world, et tant mieux. Vous lâchez les trois sur une scène, et sous vos yeux ébahis: woooaaaaaaahhhooouuuyyyeeaaaahhhhh!!! Ces trois-là sont beaux à voir. Spontanés, intenables, sincères et vraiment touchants. Je les aime.


Comme d'habitude, on vous propose trois morceaux:

Lapin Machin - I Don't Even Even Know Why

Lapin Machin - Old Stories

Lapin Machin - So Freaky (l'hymne de notre été 2006, si vous voulez savoir)

On pourrait vous mettre tout l'album. Un joli album en carton réalisé à la main, disponible à Ground Zéro (12 rue Crussol, Paris 11) ou à leurs concerts. Et ça tombe bien (whaou, il est bien foutu ce blog), ils jouent deux fois cette semaine: le mardi 6 février à la Flèche d'Or et le jeudi 8 février au Pop In.

Le concert du Pop In est annoncé comme le premier anniversaire de Lapin Machin. Alors voilà, puisqu'on est dans le DIY, bricolons un calendrier à nous: je proclame l'année du Lapin. Ca durera aussi longtemps que j'aimerai ce groupe. Comme c'est parti, ça peut durer un moment.


Petit bonus de bonheur: concert à emporter sur la Blogothèque. Merci à eux d’avoir fait ça.

Thursday, February 01, 2007

Ouh Ouh Ouh



Je me souviens d’un dessin de Luz où il écrivait qu’un des trucs les plus cools à un concert de pop c’est d’hurler en yaourt les paroles des chansons d’un groupe anglais ou américain. Comme toujours, Luz a raison. Mais l’autre chose super chouette avec la pop c’est quand même les « yeah yeah yeah », « ouh ouh ouh » et autres « la la la la ». Je veux dire, pourquoi Song 2 est-elle une chanson aussi imparable ? Le « ouh ouh ouh » est universellement jouissif. Pareil pour le « pouh pouh » de On Parade d’Electrelane. Et les exemples sont tellement nombreux. Mais pourquoi limiter ça à la pop ? Voilà un truc que Black Eyes a compris pour un titre plein de larsens entre Neptune et Charlottefield mais avec un « wouh ouh ouh » d’introduction qui est un pur bonheur. Enjoy.

Black Eyes - Someone Has His Finger Broken